Bataille de la Châteauguay de 1813
Un récit historique de la bataille de Châteauguay en 1813, réalisé en collaboration avec la Société du Musée du Grand Châteauguay.
Ayant échoué dans leurs tentatives d’envahir le Haut-Canada, les Américains prévoient d’envahir le Bas-Canada avec deux divisions distinctes qui se rencontreront pour capturer Montréal.
Le 21 octobre, 3 000 soldats et artilleurs américains franchissent la frontière et remontent la rive ouest de la rivière Châteauguay. Entre-temps, sous la direction de leur nouveau commandant, Louis de Watteville, secondé par le lieutenant-colonel Charles-Michel d’Irumberry de Salaberry, les troupes canadiennes sont à Châteauguay depuis le 19 octobre.
Prévenus de l’arrivée des Américains, la plupart des soldats canadiens se rendent à Allan’s Corner. Entre le 24 et le 26 octobre, de Salaberry leur fait abattre des arbres pour ériger des abatis et des remparts en bois des deux côtés de la rivière. Il met également en place deux zones défendues par 460 soldats canadiens, conscrits et alliés autochtones. La première ligne, sur la rive ouest de la rivière, est composée de 300 combattants canadiens et autochtones, répartis en deux compagnies de tirailleurs d’élite appelés Voltigeurs. Les Américains décident de laisser un tiers de leurs troupes et de leur artillerie à Ormstown. Le reste est divisé en deux brigades de 1 000 hommes chacune. La première brigade marcha le long de la rive ouest vers les abatis. La seconde était partie la veille, prenant la rive orientale, pour contourner les lignes ennemies.
La bataille
Le matin du 26 octobre, une première brigade de soldats américains attaque les défenseurs canadiens rassemblés derrière des abatis, mais la seconde brigade s’est perdue dans les bois la nuit précédente. Une centaine de soldats américains sortent du bois vers 11 heures du matin et tombent nez à nez avec les 40 soldats de la compagnie du capitaine Bruyère, tous originaires de Châteauguay. Surpris, les hommes des deux camps prennent la fuite. Alors que les Américains tentent de rejoindre leurs lignes dans les bois, ils sont la cible de tirs de leurs propres troupes, qui les prennent pour des ennemis. À un moment donné, les Américains sont sortis des bois à la poursuite d’une unité canadienne qui battait en retraite. Puis, de l’autre côté de la rivière, les Voltigeurs de Salaberry ont ouvert le feu. Pris dans le feu croisé entre les Voltigeurs et les hommes des unités du capitaine Bruyère et du capitaine Daly, les Américains interrompent la bataille. Après quatre heures de combat, ils se retirent.
Rapports contradictoires
Alors que le général Hampton dit avoir perdu moins de 50 hommes, une lettre de Salaberry envoyée quelques jours après la bataille établit le nombre de victimes américaines à 70 morts et 16 prisonniers. Du côté canadien, on dénombre une trentaine de victimes. Ces informations contradictoires ne permettent pas de donner un bilan précis de la bataille. Le lendemain, les Canadiens, croyant les déclarations des prisonniers, pensent avoir combattu 6 000 à 7 000 Américains, conférant à la bataille de Châteauguay le statut mythique qu’elle a pris dans l’historiographie canadienne-française. En réalité, il s’agissait d’environ 3 000 Américains contre environ 300 Canadiens.
La plupart des historiens considèrent aujourd’hui que la bataille de Châteauguay n’a été qu’un simple accrochage sans conséquence sur l’issue de la guerre.
Le Canada au moment du conflit
À l’époque du conflit, le Canada tel qu’il est aujourd’hui n’existait pas encore. Il s’agissait d’un ensemble de six colonies indépendantes : le Bas-Canada, le Haut-Canada, le Nouveau-Brunswick, la Nouvelle-Écosse, le Cap-Breton et l’Île-du-Prince-Édouard. La population totale des six colonies était d’environ 400 000 habitants, dont 260 000 vivaient au Bas-Canada.
Les raisons du conflit
Après la destruction de la flotte française lors de la bataille de Trafalgar en 1805, Napoléon interdit à toutes les autres nations européennes de commercer avec la Grande-Bretagne, et cette dernière met en place un blocus naval de la France. Les États-Unis avaient l’intention de rester neutres dans ce conflit, mais ils y ont été entraînés lorsque, pendant plusieurs années, un certain nombre de navires battant pavillon américain ont été arraisonnés par des navires britanniques, ce qui a obligé plus de 6 000 marins américains à servir dans la Royal Navy.
Le 22 juin 1807, la frégate américaine USS Chesapeake se trouvait dans les eaux territoriales américaines lorsqu’elle a été abordée par le navire britannique HMS Leopard après avoir refusé de s’arrêter pour une inspection. Des coups de canon sont tirés et trois marins américains sont tués. Cet incident pousse les États-Unis à bout et ils décrètent un embargo interdisant à tout navire de toute nationalité de naviguer d’un port américain vers tout autre port étranger. Le 18 juin 1812, les nombreux différends entre les deux pays amènent les États-Unis à déclarer la guerre à la Grande-Bretagne. L’Angleterre leur emboîte le pas en janvier 1813.
Représentation de la bataille de Châteauguay par Henri Julien (1852-1908). Lithographie publiée dans Le Journal de Dimanche le 24 juin 1884.
Charles-Michel d’Irumberry de Salaberry reçoit la médaille d’or de l’armée pour son succès à Châteauguay et est fait Compagnon de l’Ordre du Bain. (Médaille de l’Ordre du Bain)
(Photo : P.Y. Charlebois)
Esquisse de la bataille de La Fourche ou Châteauguay, 1815
(Collection du Musée Stewart (Montréal), 1982-382)